Trajectoires et territoires de la pauvreté
23-24 nov. 2023
- Montpellier (France)
https://reseau-pauvrete.sciencesconf.org
Réalité structurelle de la société française, la pauvreté ne recule plus depuis une dizaine d’années. Les instruments monétaires, les plus communs de sa mesure, indiquent même qu’elle progresse à nouveau. Elle est devenue l’état durable pour des publics divers, sur plusieurs générations désormais, et une menace pour des groupes sociaux, au-delà des classes populaires.
Les recherches sur la pauvreté ont bien montré son caractère multidimensionnel, permettant de la penser comme une exclusion sociale. Mais les politiques de lutte contre la pauvreté restent marquées par une institutionnalisation et un "traitement" qui privilégient encore les démarches d'expertise verticales et descendantes, dominées par les logiques de pauvreté monétaire. Ces politiques partagent souvent deux caractéristiques.
La participation des publics « vulnérables » est souvent un objectif des politiques sociales contemporaines. On peut cependant s’interroger sur l’adhésion des destinataires à une vision partagée et l’existence d’un consensus de leur part sur la nature et les modalités de cette implication. La manière dont les pouvoirs publics cherchent à favoriser ou à imposer une mise en capacité des publics pour faciliter leur accès aux services (connaissances des démarches et des moyens à mettre en œuvre) interroge également. Des populations précarisées se mobilisent pour résoudre leurs problèmes, voire contestent les facteurs sous-jacents à leur condition face à des politiques ancrées dans une logique d’activation, de contrôle et de sanction. Ces politiques sont régulièrement réformées sans que ne soient nécessairement prises en compte ni organisées les remontées des structures et des acteurs de terrain. Il en va de même pour l’adéquation aux attentes des publics ou à leurs capacités et temporalités d’accès à leurs droits. Cette situation interroge sur la manière dont l’action publique est pensée, élaborée, mise en œuvre et évaluée dans une perspective de prise en considération des publics et d’adaptation à la diversité de leurs besoins.
La mobilisation des publics implique également une approche territorialisée de la pauvreté, dans un environnement marqué par des inégalités sociales et territoriales. La métropolisation, par exemple, rebat les cartes de la géographie de la pauvreté renforçant au sein des métropoles les fractures territoriales existantes (QPV, quartiers centraux dégradés), poussant une partie des populations pauvres et précaires hors des métropoles vers des territoires souvent peu outillés pour l’accueil de ces populations (petites villes, zones rurales). Le sentiment d’exclusion est exacerbé par des mobilités rendues plus difficiles. La disparition des services publics dans les territoires ruraux conjuguée à la mise en place de la dématérialisation des démarches renforce les fractures territoriales et contribue à renforcer des ségrégations sociospatiales et les problématiques liées au genre. Ces différentes dimensions renforcent un impensé : celui de l’inscription des précaires dans des lieux qui constituent pour eux des ressources et que les politiques publiques peinent à intégrer.
Discipline scientifique :
Anthropologie sociale et ethnologie - Economies et finances - Géographie - Science politique - Sociologie
Lieu de la conférence