Effet de réel, effet du réel : la littérature médiévale au miroir des histoires
20-22 janv. 2022
Centre d'études supérieures de civilisation médiévale de Poitiers - Poitiers (France)
https://effetdereel2022.sciencesconf.org
La question du réel est tout entière celle des lettres médiévales : de leur réalité matérielle et intellectuelle, de leur horizon de production et de réception, de leurs auteurs affichés ou anonymes, de leur vocation. Mais qu’est-ce que le réel au Moyen Âge ?
Qu’il s’agisse de la matérialité de l’œuvre, de sa paternité, des commanditaires ou des destinataires qui en éclairent l’existence, des faits de langue qui la connotent, la localisent, la datent, l’inscrivent dans un continuum linguistique, des enjeux intellectuels, politiques ou religieux qui la subsument ou de la création poétique ou fictionnelle qui en fait une réalité littéraire à la fois subsidiaire et autonome par rapport à l’horizon temporel dans lequel le texte est écrit, la recherche est confrontée à l’éternel calibrage de la bonne distance critique. Si ce que l’on doit comprendre est déjà en partie compris dans le texte, il est alors indispensable pour l’herméneute de savoir reconnaître ce que l’intention des auteurs a voulu faire apparaître dans l’œuvre pour qu’elle soit ainsi comprise, de savoir identifier ce que s’y est glissé et qui constitue la partie résiduelle du cercle herméneutique que seuls le temps et la recherche peuvent espérer mettre au jour.
Le premier de ces deux réels, que Roland Barthes a baptisé « effet de réel », paraît signaler des processus esthétiques qui jouent sur les ressorts de l’illusion référentielle et de la suspension d’incrédulité. Le second, que Nancy Regalado a appelé avec une formule heureuse « effet du réel », semble désigner les traces plus ou moins conscientes des relations biunivoques que le texte entretient avec la réalité extratextuelle. Ainsi posés l’un en face de l’autre, ces deux réels semblent recouvrir la presque totalité des lettres médiévales. Rares sont en effet les œuvres où l’auteur n’a pas essayé d’entraîner le lecteur vers un monde en trompe l’œil ; encore plus rares sont les textes qui ne révèlent pas des signes, du moins à nos yeux, de la réalité historique, linguistique ou intellectuelle dont ils sont à la fois le reflet et le creuset.
Or la notion de réel n’est évidemment pas la même au Moyen Âge et aujourd’hui ; elle est aussi très différente pour un auditeur de la matière de Bretagne ou des chansons de geste au XIIe siècle ou pour un lecteur de Charles d’Orléans et de François Villon à la moitié du XVe siècle.
Discipline scientifique :
Linguistique - Littératures
Lieu de la conférence